Le mausolée du Lieutenant Atwood MORRIS


De durs combats se déroulèrent au cours des sombres journées du 9 au 13 octobre 1914. Les troupes britanniques subirent de lourdes pertes pour la reprise du village de Méteren aux Allemands.
Les parents d'un officier britannique tué le 13 octobre 1914 à Méteren vont obtenir l'autorisation exceptionnelle de faire enterrer leur fils dans une tombe individuelle là où il est tombé et ceci après bien des péripéties.
En effet, la tradition britannique est différente des usages français. En France, une famille peut réclamer la dépouille d'un militaire mort pour la France pour l'inhumer dans sa région d'origine, aux frais de l'État. En Grande-Bretagne, il en est autrement et les soldats sont inhumés dans le cimetière militaire britannique le plus proche du lieu où ils ont été tués, sans possibilité de transfert en Grande-Bretagne, sauf très rares exceptions.
L'inhumation du Lieutenant MORRIS dans un mausolée individuel à Méteren constitue justement une exception à ces règles.

Qui était le Lieutenant MORRIS ?
Anthony George Atwood MORRIS est né le 19 mai 1887 à Rugby, que l'on dit être le berceau du sport du même nom. Située dans le Warwickshire, à 20 km de Coventry, la cité avait, en 2005 une population évaluée à 91600 habitants.
Anthony était le plus jeune fils de Mr Frederick Arthur MORRIS et Mrs Cunitia ATWOOD.
Il fit ses études au Winchester College, puis rejoignit la Milice avant de s'engager en 1907 dans le 1er Bataillon Royal du Lancaster Regiment.
Il fut promu lieutenant en avril 1911 puis, à la déclaration de guerre, en 1914, fut affecté au 3ᵉ bataillon (réserve) de ce même régiment. Volontaire pour le front, il rejoignit à nouveau le 1er bataillon le 17 septembre 1914. Il y fut chargé de la section de mitrailleurs peu après son arrivée et prit part à la bataille d'Armentières.

Dans quelles conditions est-il mort ?
Les Allemands qui occupaient Lille, Armentières et Bailleul voulurent pousser leur percée vers Calais et Dunkerque, mais ils furent arrêtés par les alliés sur une ligne Cassel-Hazebrouck et refluèrent ensuite vers Méteren qu'ils mirent en état de défense.
Le 12 octobre, après un bombardement intensif de l'artillerie britannique dirigé vers les abords de Méteren, pour tenter de neutraliser le système défensif allemand, l'infanterie anglaise va prendre position aux lieudits Zacht Leven, Courte-croix et aux Sept Ormes, pour attaquer le village, mais le feu nourri des Allemands fait reporter l'offensive au lendemain.
Le 13 octobre, le 1er Bataillon était à l'extrême droite de l'offensive, le lieutenant MORRIS emmenant sa section de mitrailleurs en couverture, mais ils avaient été repérés. Dès qu'il déboucha de derrière les haies, le Lancaster Regiment fut pris sous le feu ennemi dont les mitrailleuses étaient installées dans le chemin de ronde du clocher de l'église. Le lieutenant MORRIS et ses mitrailleurs avaient pris position derrière une haie clairsemée où lui et ses hommes furent retrouvés plus tard dans cet alignement, tous morts et leurs mitrailleuses hors d'état.

Les pérégrinations d'un soldat mort
Ils furent enterrés dans le cimetière autour de l'église, mais après la guerre, quand les autres furent ré inhumés dans le cimetière militaire de Méteren, les parents MORRIS décidèrent de ramener le corps de leur fils pour l'enterrer chez eux.
En fait, ils atteignirent Calais pour apprendre que cela n'était pas permis. Ils firent demi-tour et inhumèrent provisoirement leur fils avec ses hommes. Parallèlement, les parent achetaient deux hectares de la terre entourant l'endroit où leur fils avait été tué. S'agissant d'une famille influente et fortunée, elle obtint une dérogation à la réglementation du Ministre Britannique des Armées.
Tous les ans, avant la guerre de 1939-1945, la mère du défunt, Mrs MORRIS, venait prier sur la tombe de son fils. Elle cessa ses visites en 1940 et est décédée en 1946.
Elle avait deux autres enfants. Un fils, Jack Arthur ATWOOD MORRIS, Capitaine dans la marine royale britannique et une fille, mariée à un descendant de la famille royale des STUART.
Où se trouve le mausolée ?
Depuis la construction de l'autoroute A25 qui a coupé la rue Vyverput, on ne peut plus accéder directement au mausolée, comme jadis, depuis le centre du village. Deux itinéraires sont possibles :
- Emprunter la sortie vers Flêtre par l'ancienne Nationale devenue D933, puis tourner à gauche, avant le passage sous l'autoroute pour prendre la Beunstraete puis la rue Vyverput.
- Rejoindre la route d'Hazebrouck (RN42) puis prendre le deuxième chemin à droite qui mène directement à la rue Vyverput, puis au mausolée, situé à l'extrémité d'un chemin d'accès particulier.

 La forme originale du mausolée
Il s'agit d'un bâtiment en briques, en forme de pagode, où quatre piliers de maçonnerie supportent un toit rustique à quatre pentes, couvert de tuiles. Le plafond est lambrissé. Une murette ajourée à quatre entrées est installée entre les piliers.
Le versant du toit, face à l'entrée, supporte une imposante horloge amenée d'Angleterre où elle était installée sur les écuries des parents. Une lucarne dans la face opposée du toit permet l'accès au grenier.

La tombe
En 1920, le corps du lieutenant MORRIS est transféré dans le mausolée pour y reposer définitivement sous une simple croix de granit. La tombe est entourée d'un encadrement revêtu d'une inscription en anglais que l'on peut traduire comme suit :
"A la chère mémoire d'Anthony George ATWOOD MORRIS du Régiment Royal du Lancaster, né le 19 mai 1887, tué au combat le 13 octobre 1914 à Méteren au cours de la Grande Guerre avec l'Allemagne."

L'entretien du mausolée et de son environnement
 À l'origine, il semble que l'exploitation de la terre et de la pâture ait été accordée au cultivateur voisin moyennant l'entretien du mausolée, du chemin d'accès et le remontage de l'horloge. Trois exploitants se sont ainsi succédé dans ces conditions : M. HERREMAN, M. Jean-Baptiste DETHOOR et M. Fernand GOMBERT.
Après la seconde guerre mondiale la famille MORRIS a tenté de négocier le don de sa propriété au Bureau d'Aide Sociale avec des charges d'entretien identiques aux précédentes, mais la proposition n'a pas été acceptée à l'époque. Ce n'est qu'en 1965 qu'un accord définitif fut réalisé avec la famille, aux termes duquel le Bureau d'Aide Sociale devient propriétaire et loue les parcelles à un agriculteur qui assure les charges d'entretien contre une réduction du fermage. Le 9 mai 1965 une cérémonie officielle, à laquelle assistait la famille MORRIS, a scellé la donation.
En 1999 d'importants travaux ont été réalisés pour maintenir en état le mémorial qui en avait grand besoin. Les fonds furent collectés par l'intermédiaire de la Fondation Battlefield Mémorial et de la Western Front Association.